La responsabilité du fait des animaux

6 Août 2022 | Agricole, Habitation, Particulier

Stéphane Lacombe
Stéphane Lacombe, B. Adm., B. Droit
Courtier en assurance de dommages

Ma vache traverse la clôture et cause du dommage chez le voisin, suis-je tenu de le dédommager?

Mon chien, attaché à ma galerie, fait sursauter le livreur qui tombe et se brise une hanche; suis-je responsable des dommages subis au livreur?

Les animaux, même ceux que l’ont croit bien dressés, peuvent être imprévisibles et agir de façon à causer du tort à un tiers. Est-ce que le propriétaire est toujours responsable de l’animal?

Y a-t-il des exceptions pouvant s’appliquer?

Le Code civil du Québec est très clair à ce propos :

Article 1466. Le propriétaire d’un animal est tenu de réparer le préjudice que l’animal a causé, soit qu’il fût sous sa garde ou sous celle d’un tiers, soit qu’il fût égaré ou échappé. La personne qui se sert de l’animal en est aussi, pendant ce temps, responsable avec le propriétaire.

À partir du moment où il est démontré que le dommage a été causé par l’animal, son propriétaire est donc toujours responsable du dommage que son animal a causé, même s’il n’en a pas la garde à ce moment précis, même s’il est attaché, et même si la victime s’est aventurée sur la propriété du propriétaire de l’animal sans sa permission. Les seules défenses pour ne pas être déclaré responsable sont que soit la victime a clairement poussé l’animal à avoir ce comportement, ou soit que c’est un cas de force majeure, c’est-à-dire un évènement imprévisible et qu’on ne pouvait pas empêcher.

D’autre part, il faut comprendre que lorsqu’on lit dans l’article 1466 « La personne qui se sert de l’animal… », ça veut dire « la personne qui fait usage de l’animal »1 ou « la personne qui en a la garde »2. Le fait qu’une autre personne avait la garde de l’animal ou s’en servait n’enlève pas la responsabilité de son propriétaire. Ça ne fait qu’ajouter une personne à celles qui sont obligées de compenser la victime.3

 

Voici un exemple d’un cas de responsabilité et un exemple d’un cas de non-responsabilité :

Responsabilité

Les propriétaires d’un troupeau de bovins ont été négligents dans l’entretien de leurs clôtures, de telle sorte que leurs animaux en ont défoncé une partie pour aller se régaler des cultures de bleuets et de légumes de leur voisin, et endommager sa prairie par la même occasion. Bien que les longueurs de clôtures à entretenir étaient importantes, ce qui augmentait les risques d’avoir des portions de clôtures plus fragiles, c’était aux propriétaires des bovins de prendre les moyens nécessaires pour les contenir à l’intérieur de leur propriété, et non au voisin de les empêcher de pénétrer sur sa terre. Ils ont donc été déclarés responsables des dommages causés par leurs animaux.

Non-responsabilité

Un homme est en train d’étriller un cheval de trait dans un enclos lors d’un festival. L’homme est habitué d’entretenir des chevaux et l’a souvent fait pour ce cheval de 1 800 livres, connu pour être paisible. De jeunes garçons lancent alors des cailloux vers l’enclos et atteignent l’animal. Le cheval rue et l’homme qui l’étrillait réussit à éviter que cette ruade ne le frappe au visage, mais il se fait tout de même frapper au haut du torse. Le propriétaire de l’animal, qui a vu la scène, s’est immédiatement porté au secours de l’homme et a fait le nécessaire pour qu’il soit rapidement transporté en ambulance. Il a subi de graves blessures qui ont nécessité 10 jours d’hospitalisation et une longue convalescence. Dans ce cas, le comportement de l’animal a été provoqué par une cause extérieure, absolument imprévisible et irrésistible. Ceci constitue un cas de force majeure qui permet au propriétaire de l’animal de ne pas être responsable des dommages.4

C’est pourquoi il est très important de faire connaître à son assureur (que ce soit en assurance habitation, en assurance agricole ou en assurance entreprise) le fait qu’on possède un animal ou qu’on a la garde d’un animal (ou plusieurs, selon le cas), et de bien assurer sa responsabilité pour éviter de subir les contrecoups financiers d’une telle situation. Il faut également porter attention à sa police d’assurance pour être certain que la couverture de ces situations n’est pas limitée ou exclue.

Parlez-en à votre courtier en assurance de dommages pour voir en détail si vos couvertures correspondent à vos besoins.

1 dans l’affaire Dion c. Charette, (Cour supérieure du Québec, 2016-11-28), 2016 QCCS 5811
2 dans l’affaire Gilbert c. Provost, (Cour supérieure du Québec, 2015-10-14), 2015 QCCS 4741
3 dans l’affaire Lavallée c. Vincent, (Cour du Québec, 2013-06-21), 2013 QCCQ 9545
4 dans l’affaire M.F. c. Festival western de St-Tite inc., (Cour supérieure du Québec), 2009 QCCS 355